2020年2月12日水曜日

jogleor n.m.


jogleor n.m.

Formes : (an.fr.) jogleour, jougleur, jogelour, jugleeur, jogeler ; giculer, giogoler, jougler, joculer ; (m.fr.) jugleor,  jogleor, jougleur ;  (fr.mod.) jongleur

Étyml. : JOCULATOR , ORIS (latin)  n.m. : rieur, railleur, bon plaisant. (Gaffiot) ; bouffon, jongleur (Blaise, Niermeyre)

Réf. : FEW V, 41b « joculari » ; TL, V, 1705 ; Godfroy, IV, 660a « jougleor  » , « jougler » , X, 50c ; Huguet IV, 723a

Dér. : jogler, jongler v.i ; jonglerie n.f. ;

I. Homme qui aime à plaisanter , qui est badin. (13 siècle, Gdf ; Joufr) : Les fols et culs qui sont trops sages et jugleeurs tu fuyras. J. de Salisbury Policraticus, Richel. 24287, f° 5d. ;
II. Musicien, ménéstrel , qui récitait et chantait des vers et jouait de l’instrument comme vielle ou harpe, ambulant dans les cours, les tournois, les villes (12-13 siècle, Gdf )  :  Dunt il ert nez pas ne saveit, De lui son juglëur feseit Estorie des Engles de Gaimar (v.1140) 166 ;  Faites cy venir les jugleurs, Qui ces gens cy esbaudiront : Plus liez seroont quant les orront Miracle de l'evesque que l'arcediacre murtrit (1341) ; Jougleurs, qui font [gens] resjouir Et menestriers peut on ouyr Celle part corner a toute heure Chr. de Pizan, Le Livre de la Mutacion de Fortune, I, 150 (1400-1403) ;
III. Joueur de tours de passe-passe, bateleur qui joue avec des boules, avec des cercles, des couteaux, etc. ; saltimbanque.
IV. Terme d’injure, débauché, ribaud, canaille :
V. Railleur, moqueur ; plaisantin (XIVe s.) : Car telz genz nous les appellon jauglëeurs et ne dison pas que ilz soient desactrempés. Nicolas Oresme, Le Livre de Ethiques d'Aristote (c.1370)
VI. Comédien , acteur  (XVIe s.) : [Domitien] feit occire un jongleur nommé Elvidius, pour ce qu’il avoit joué par personages le divorce de Paris et Oenone. Lemaire de Belges, Ilustrations de Gaule, II ; En ceste maniere voyons nous entre les jongleurs … le personaige du sot et du badin estre tous jours represente par le plus petit  et perfaict joueur de leur compaignie. Rabelais, III, 37.
VI. Espèce de devin guérisseur ; sorcier chez les mérindiens.

Le mot est issu du latin joculator, dérivé de jocus « plaisanterie, jeu sur les mots ; amusements » ( jeu). Le mot joculator signifie dans le latin classique « un homme qui aime à plaisanter ». Nous attestons son premier emploi dans Epistulae ad Atticum de Cicero, IV,16, 3. Selon Faral (Les Jongleurs en France, 1910, p. 2), c’est à partir du  IXe siècle que les mots joculares ou joculatores appariassent dans le latin des clercs comme synonyme de historio, mimus, pantomimus, scenicus, thymelicus, etc. Il convient donc de placer à peu près à cette époque les débuts des jongleurs et de faire commencer là leur histoire. La plus ancienne attestation du mot jogleor dans le texte français se trouve,  cité par TL, dans l’Estoire des Engleis, chronique en vers de Geffrei Gaimar, rédigée vers 1140.
 La forme actuelle naaslisée « jongleur » est due à un croisement avec l’ancien substantif jangleor, signifiant « bavard, hâbleur, médisant », dérivé de l’ancien verbe d’origine francique jangler (v. FEW XVI, 280b «*jangalôn » ).
Voir : menestrel ; vieleor ; conteor ; harpeor ; troveor ; lecheor, etc. Pendant le Moyen Âge, le jongleur était un synonyme de ménestrel, celui qui jouait de l’instrument muscial, surtout de la vieille, récitait ou chantait des vers dans les cours seigneuriales ou les villes.

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